Renouveau de lutte de classe en France
Rapport sur les nations du OCML (VP)
Le 9 juin dernier, 30 à 40 000 manifestants dans les rues de Paris contre tout
licenciements. C’était la plus importante manifestation des ces derniers mois.
Surtout la plus importante manifestation, préparée et
réalisée par la base syndicaliste et cela depuis très longtemps. Plus
important encore, ce fût une manifestation « radicale » dans ses mots
d’ordre : « Non à tout licenciement, non à toute
suppression d’emploi ». Ainsi les travailleurs rejetaient
les « plans sociaux » de licenciements et affirmaient ne pas tenir compte de la
situation de l’entreprise, qu’elle fasse ou non des profits.
Depuis plus de 20 ans, les restructurations (et donc
les licenciements) ont été encouragées par les gouvernements de droite comme de
gauche ; les directions syndicales réformistes les acceptaient au nom de
la « bonne marche de l’économie ».
Ce mouvement venait de loin
Il venait de l’expérience accumulée, qui a fait se poser beaucoup de
questions aux travailleurs au cours de ces 10 dernières années de
« modernisation » économique, de restructurations industrielles, de
licenciements, de précarité.
Il venait de la réorganisation, lente
mais continue, du mouvement ouvrier, après des années de dispersion,
d’individualisme. Ainsi de nouveaux syndicats ou de nouvelles oppositions
syndicales dans les syndicats réformistes se sont développés.
Il venait du rejet
croissant des idées réformistes dominantes (collaboration de classe, consensus
social,...) et de l’usure des discours patronaux et
gouvernementaux. Tout ceci a donné naissance à un nouvel état d’esprit.
Ces 2 dernières années nous
avons vu:
Un développement des luttes
sociales dans tous les secteurs (publics ou privés).
Un développement croissant
d’oppositions politiques au gouvernement social-démocrate. Ces nouvelles
oppositions populaires se situent nettement à gauche du gouvernement,
même si elle n’est pas encore porteuse d’un projet politique bien clair.
Enfin, c’est un développement
(et un engagement) politique parmi certaines couches d’ouvriers, d’employés et
même dans la petite bourgeoisie : le rejet du jeu politique bourgeois est
explicite ; la gauche est mise à égalité avec la droite.
Notre organisation ML a soutenu
le développement du mouvement indépendant de lutte contre les
licenciements et nous y avons été partie
agissante. Dans ce mouvement nous nous sommes efforcés de rendre plus conscient
de lui-même ce nouveau mouvement d’opposition des travailleurs. Nous avons
continué à développer notre politique autour de la nécessité de défendre
les seuls intérêts des travailleurs, sans se soucier de ceux de
l’entreprise, de l’économie ou de ceux de la France. Nous avons lutté pour que
la rupture politique avec le gouvernement et avec la politique du
soi-disant parti communiste soit la plus
consciente.
Enfin, nous avons appelé à
reconstruire une « opposition anticapitaliste » dans la perspective
d’une société socialiste et
révolutionnaire.
Nous prendrons comme exemple de ces changements les résultats des élections municipales que notre Comité Central analysait il y quelques mois.
Ces élections montrent tout d'abord le rejet
croissant du jeu politicien traditionnel dans de larges secteurs populaires les
plus touchés dans leur conditions de vie et de travail. Le nombre d'inscrits
sur les listes électorales diminue, les abstentions continuent à augmenter,
jusqu'à 60%; les votes blancs et nuls doublent depuis 1995, et les travailleurs
immigrés ne votent toujours pas. Les masses s’éloignent du processus électoral.
Ainsi, dans certaines communes populaires, les maires sont élus avec moins de
10% de la population.
Cela n’a cependant pas que des aspects
positifs : dans les milieux populaires, cela correspond aussi à la
disparition d’une conscience collective, et donc au développement des réactions
individuelles.
Il y a aujourd’hui une conscience croissante,
largement partagée, que la droite et la gauche ne proposent que des projets peu
différents.
Le PCF fait les frais de cette évolution en
perdant des municipalités importantes. C’est un parti en déclin, tout comme
l’est sa base sociale : l’aristocratie ouvrière.
La gauche ne se distingue plus de la droite,
voilà une des raisons de l'abstention massive, …
Par ailleurs, l’extrême-droite n’a pas tiré
profit du scepticisme des travailleurs. Mais la diminution de ses scores ne
signifie nullement sa disparition. …
Si l’abstention progresse, on constate aussi
la recherche d'une alternative, d'un choix "différent".
La petite-bourgeoisie, déçue de la gauche, du
PS comme du PC, est active dans ce qu'on appelle le "mouvement
social" (soutien aux sans-papiers, Droit au logement, les
anti-mondialisations...). Elle est à l'origine du succès des Verts comme des
listes dites "alternatives » . Ces succès ne se font pas dans
les quartiers populaires qui attendent des mesures sociales et des propositions
véritablement radicales (contre le chômage, les mauvaises conditions de
travail, le manque de logements.)
Mais l'affirmation la plus marquée de la
recherche d'une alternative se trouve dans les résultats de ce qu'on appelle
« l'extrême gauche ». Les listes présentées par les trotskistes,
nombreux en France, sont beaucoup plus nombreuses qu'en 1995 et réalisent des
scores qu'on peut qualifier de remarquables (jusqu’à 17,5% dans une commune).
C'est
la marque d’une radicalisation politique évidente d'un secteur de la
population, essentiellement dans les quartiers ouvriers et populaires autrefois
liés au PC. Par ailleurs, une partie des secteurs petit-bourgeois déçus de la
gauche s’est aussi rallié à ce choix.
C'est d'abord un vote de protestation et de
défiance, avant d'être une approbation véritable de la politique de telle ou
telle organisation d’extrême gauche. C'est un vote qui se renforce et se
consolide. C'est un vote qui n'a rien de spontané et est le fruit d'une
présence militante visible, forte et de plus en plus crédible, dans les
entreprises comme dans les quartiers. Enfin, c’est un vote qui donne de la
crédibilité à tous ceux qui s’affirment ouvertement comme
” révolutionnaires ”.
Quelques leçons politiques importantes :
* La combativité des travailleurs se manifeste
chaque jour plus. Mais cette radicalisation est marquée par
l’anarcho-syndicalisme, car aucune alternative politique ouvrière ne donne de
perspective à l’attente réelle qui existe chez les travailleurs les plus
conscients.
* Dans cette période de confusion, des
propositions alternatives plus ou moins radicales, plutôt conciliantes envers
les partis réformistes, attirent et gagnent en influence :
l’anarcho-syndicalisme, les organisations trotskistes ou des courants
anti-mondialisation.
* Il y a une radicalisation politique évidente
d'un secteur ouvrier et populaire. Cette radicalisation se manifeste dans une
partie du vote pour l'extrême-gauche, mais aussi dans une frange des
abstentionnistes en attente d'une politique véritablement différente.
* Comme nous l’avons affirmé lors de nos deux
derniers congrès, nous devrons développer notre travail dans la classe
ouvrière, dans les entreprise et les quartiers et changer notablement notre
style de travail et d’intervention.
Sommes-nous en train de franchir une nouvelle
étape ?
1/
La gauche gouvernementale est largement rejetée par les masses
populaires et petites-bourgeoises.
2/
Une fraction importante des éléments conscients rompt politiquement avec
elle, pour rechercher ailleurs une alternative.
3/
le mouvement de masse tend à rompre avec le corporatisme d’entreprise, de
région, de pays ; se coordonne vers un « tous ensemble »
mondialisé… La conscience qui semble naître parmi les masses c’est d’appartenir
au monde du travail contre les actionnaires mondialisés. C’est un progrès vers la conscience d’appartenir à une classe
prolétarienne. C’est l’accentuation de
la rupture d’avec le consensus national
4/ Les anti-mondialistes se
rejoignent
Le mouvement
anti-mondialiste et le mouvement gréviste radical se rejoignent dans le refus de la
mondialisation capitaliste : les grévistes reçoivent José Bové et celui-ci
donne la parole aux grévistes.
5/ Combattre le centrisme en pratiquant le Front Unique
La déviation anarcho-syndicalisme de masse
trouve son expression politique dans la
montée du trotskisme. Cela traduit bien où en sont les éléments avancés :
une rupture incomplète et frileuse d’avec le réformisme qui se satisfait d’un
activisme radical.
Le mouvement
ML est en reconstruction. Ses progrès dépendront de notre politique et
de notre tactique. Pour changer la situation il nous faut combattre
l’économisme radical et le doctrinarisme.
En avant vers
la création du Parti Communiste Révolutionnaire