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CONGO - KINSHASA:

 

La crise a atteint le sommet de la destruction de la nation congolaise

 

 

1. Bref rappel historique

 

Le chaos occasionné par le régime de Mobutu continue à se généraliser même quatre ans après sa chute. Les tentatives de résolution avec l'appui de certains pays africains, notamment le soutien de la rébellion de 1996 et celle de 1998, n'ont pas abouti aux résultats escomptés. Les efforts de pacification à travers les Accords de Cessez-le-feu de Lusaka signé en juillet 1999 s'avèrent encore insuffisants, eu égard au résultat enregistré dans leurs applications sur le terrain. Le Dialogue inter-congolais, un des principes de ces Accords qui devait se tenir 45 jours après sa signature est finalement prévu pour le 15 octobre 2001. A la veille, nous ne sommes même pas sûr que ce forum va avoir lieu.

 

Toutes ces tergiversations peuvent s'expliquer par le fait que les acteurs armés (la rébellion, le gouvernement de Kabila et leurs alliés respectifs) redoutent tous l'appropriation du processus de paix par une dynamique politique interne qu'ils n'ont pas de chance de contrôler. Il apparaît clairement aujourd'hui que la dynamique militaire n'est pas à elle seule porteuse de la réponse à la résolution de la crise générale au Congo. Bien au contraire, dans la pratique, cette dynamique semble poursuivre les objectifs totalement opposés aux intérêts fondamentaux du peuple congolais.

 

De l'apport des formations politiques congolaises armées et/ou non, il se dégage un fait qu'autant leur adhésion au processus de paix est nécessaire dans la phase de la pacification, autant elles ne présentent pas une alternative pour une paix durable au Congo. Toutes ces formations se battent pour un court terme, se focalisant dans les projets de leur survie politique respective.

 

2. Les causes lointaines et immédiates de la crise

 

Avant comme après l'indépendance, le peuple congolais, dans ses différents troubles, a souffert cruellement de manque d'une organisation des patriotes et des révolutionnaires professionnels totalement engagés et travaillant avec les méthodes modernes d'organisation. Il y a eu des individualités qui ont fait montre des qualités très remarquables tant sur le plan de leur engagement personnel que sur le plan de bravoure. Les exemples sont très nombreux parmi lesquels beaucoup ont sacrifié leur vie d'une manière consciente pour sauver la patrie du joug des oppresseurs. Lumumba et tout le noyau des nationalistes des années soixante ont été froidement assassinés et sans que ces actes ignobles ne dissuadent les jeunes congolais à lutter pour leur patrie.

 

Face à la crise aujourd'hui, les tentatives de solutions que l'on veut apporter s'inspirent entièrement de méthodes et tactiques des années 60, période de l'indépendance.

 

L’indépendance du Congo, le 30 juin 1960, fut précédée de nombreuses rencontres: conclave de Tananarive (Madagascar), de Lovanium (Congo), … et la Table ronde de Bruxelles (Belgique). Dans tout ces forums, le maître mot était d'écarter les courants nationalistes et surtout révolutionnaire ou à défauts leurs représentants les plus en vue. Une campagne anti-communiste vulguaire sera menée avec la complicité de l’Eglise catholique. Les idées révolutionnaires se sont développées dans les milieux universitaires sans toutefois avoir de liaison avec la masse. Les dirigeants révolutionnaires conséquents étaient systématiquement assasinés et ceux qui parvenaient de passer à travers les mailles du fillet étaient contraints à l’exile.

 

Les masses populaires quant à elles – les paysans, les ouvriers et les sans emploi – avait joué un rôle déterminant dans la lutte pour l’indépendance en s'impliquant activement dans la révolte du 04 et 05 janvier 1959 au cours de laquelle plus de 300 personnes périrent sous les balles de la Force publique. Les paysans et les ouvriers avaient mené une campagne de désobéissance civique en refusant de payer les impôts et en boycottant les institutions coloniales. La plupart des « évolués », par contre, avait adopté une attitude hostile à la lutte ou à la limite restait passif. Une minorité avait néanmoins participé à la lutte pour réformer le système.

 

Le Dialogue inter-Congolais va, encore une fois, se tenir dans le même état d’esprit. Le pré-dialogue qui a eu lieu à Gaborone (Botswana), dans le cadre des préparatifs de ce Dialogue, les participants, dont le gouvernement, l'opposition armée, l'opposition non armée et la société civile, se sont arrangés pour qu’ils se retrouvent seuls dans ce Dialogue qui pourtant va discuter des grands problèmes pour la résolution de la crise au Congo. Ils ont rejeté la participation d’autres forces, surtout celles à tendance progressiste et révolutionnaire. Pour y participer, il faudra se ranger derrière l'une de ces quatre composantes Certaines forces politiques et sociales comme l’Eglise ont déjà dénoncé ces tentatives d’exclusion dont elles sont victimes.

 

Ces quatre composantes ne doivent leur existence et leur survie que grâce à la présence des forces étrangères. Quand on sait que les rapports non disciplinés et non codifiés avec les forces étrangères ou les organisations amies ont fait des ravages même dans la plupart des mouvements révolutionnaires en Afrique et dans le monde, il y a de quoi s'inquiéter quant au bon déroulement et au résultat de ce forum auquel les congolais ont placé tout leur espoir.

 

3. Le Congo après Mobutu

 

En 1997, après plus de trente-deux ans de mobutisme, la République démocratique du Congo ouvrait une nouvelle page de son histoire tourmentée : la décolonisation, les sécessions qui s'en étaient suivies, la dictature de Mobutu et, enfin, la victoire de la rébellion de l'Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL), conduite par Laurent-Désiré Kabila. Le bilan est lourd et les contrastes immenses. D'un côté, un pays potentiellement riche, quelques îlots de richesse peu ou mal exploitée, un Etat quasi inexistant qui, du temps de Mobutu, avait fait preuve de son incapacité à mettre en valeur l'immense potentiel humain et économique. De l'autre côté, un pays pauvre, en crise, fortement endetté, dans un état de dénuement total, mais avec une population pleine de vitalité, fourmillant d'initiatives dont la majorité s'épuise dans la lutte quotidienne pour survivre.

 

Une des caractéristiques du régime de Mobutu était l'affaiblissement de l'Etat. Ce dernier avait quasiment disparu dans certaines régions et n'était vraiment qu'une réalité dans la capitale. D'une manière générale, l'Etat ne remplissait plus ses fonctions essentielles, tels que l'entretien des infrastructures ou la fourniture de services sociaux de base. Les conditions matérielles et sociales sont dramatiques. L'approvisionnement en eau potable, principalement limité à Kinshasa et aux grandes villes, est devenu problématique. L'enseignement primaire et secondaire a fortement régressé avec la crise économique et les troubles politiques intervenus depuis 1970. Les écoles sont souvent dans un état déplorable, manquant de livres de classe, de matériel pédagogique et d'équipements. La santé a vu sa qualité se dégrader. Déjà en 1986, l'Etat ne finançait que 5 % des coûts récurrents du secteur, contre 50 % dans la plupart des autres pays d'Afrique subsaharienne. Le solde était assuré par les entreprises, les bailleurs de fonds, les ONG et les consommateurs.

 

La dégradation générale du pays se reflète dans les indicateurs macro-économiques. Selon le rapport de la Banque Mondiale, elle aurait retardé d'au moins un demi-siècle le développement de la République démocratique du Congo. Les seules entreprises qui existent encore et fonctionnant presqu’à 10% de leur capacité sont celles du secteur minier et de la bière. Le secteur informel, orienté vers l’économie de substance s’est considérablement développé. Le secteur moderne orienté vers l'exportation s'est, en revanche, rétréci. La gamme des produits exportés s'est sensiblement réduite pour ne plus comprendre que les produits miniers, l'huile, le café et les bois tropicaux.

 

La République Démocratique du Congo est un pays ruiné où tout est à reconstruire. Toutefois, le pays ne manque pas de compétences et d'initiatives. Reste à créer les conditions du redressement. La paix et le développement de la République Démocratique du Congo, qui figure parmi les grands pôles économiques et géostratégiques du continent, représente un enjeu majeur pour l'ensemble de l'Afrique car elle aura un effet d'entraînement considérable sur les économies des pays voisins. C'est pour cette raison que jadis, l’AFDL avait bénéficié du soutien des Etats de la Région pour jouer ce rôle du centre redynamisateur du processus de la résolution de la crise générale au Congo. La logique du pouvoir pour le pouvoir, la conception militariste du pouvoir de Kabila ont conduit à une politique de répression des forces démocratiques et de manipulation, en sa faveur, des forces fascistes présentes dans la région avec comme conséquence l’isolement au plan national et le déclenchement d’une nouvelle guerre. Kabila qui hier était présenté par les Etats africains comme solution, est devenu un problème, au point de mobiliser une bonne partie de l’Afrique pour le neutraliser. Trois ans plus tard il sera assassiné dans des conditions relativement obscures.

 

Son fils sera désigné pour lui succéder avec la bénédiction de toutes les forces impérialistes.

 

Neuf mois après l'accession de Joseph Kabila au pouvoir où sommes-nous?

 

Les conditions matérielles de la majorité de la population ne font que se détériorer.

 

Deux rapports de l'ONU rendus publics le lundi (1er octobre 2001) brossent un tableau particulièrement sombre de la situation du Congo. On ne note aucune amélioration de la situation en dépit du changement de gouvernement survenu à la suite de l'assassinat du président Laurent-Désiré Kabila.

 

Selon le dernier rapport du rapporteur sur les droits de la personne pour la RDC, Roberto Garreton, à l'est du pays les combats qui se poursuivent laissent dans leur sillage des milliers de morts et de blessés, des maisons incendiées, d'orphelin et une pauvreté qui chaque jour va en s'aggravant. Quelques 8 pour cent des 50 millions d'habitants de la RDC sont maintenant sans domicile - le nombre a doublé en un an - 66 pour cent n'ont pas accès aux services médicaux et 5 pour cent des adultes sont infectés par le HIV/SIDA.

 

Dans son rapport, le Secrétaire Général des Nations Unies, M. Koffi Annan affirme que le niveau de souffrance de la population congolaise est parfois difficile à imaginer. Il cite en exemple 200.000 personnes qui se sont réfugiées, ou plutôt cachées, en forêt dans la province de l'Equateur parce qu'elles n'ont plus de vêtements à porter et aucun secours humanitaire ne leur parvient.

 

Le paysage politique actuel, caractérisé par l'absence d'un mouvement démocratique fort, ne donne pas assez de chance à une alternative fiable pour une paix durable au Congo. Le chaos politique actuel, malgré la radicalisation des moyens de lutte y compris la lutte armée, ne pourra contribuer qu'à l'éparpillement des énergies.

 

La rébellion, organisée par les forces étrangères, est un ensemble de sous groupes marginaux sous l'influence de ces forces. A l'Est du Congo, cette rébellion fait face à la résistance des forces d'autodéfense populaires communément appelées Maï-Maï. Ces forces sont subdivisées en plusieurs groupuscules ayant chacune son propre commandement. Elles se caractérisent par une absence criarde de la direction politique, caractéristique de tout mouvement à caractère spontané. D'où des sérieux problèmes de logistique qu'elles connaissent.

 

Le camp gouvernemental, ne se reposant pas sur une organisation politique avec des revendications claires, ne représente pas un courant important du point de vue social et de l'adhésion populaire.

 

L'opposition non armée et ce que nous appelons "la société civile" sont quant à elles des conglomérats d'associations incapables de s'attendre sur les questions essentielles. Elles sont beaucoup plus dans la lutte de positionnement.

 

La masse du peuple qui tient à la paix et à la reconstruction du pays a de plus en plus du mal à trouver ses vrais représentants.

 

La situation actuelle du Congo exige une organisation qui devrait s'occuper de l'ordre social dans son ensemble que d'avoir une organisation avec des vues sectaires et opportunistes. Un regroupement des patriotes et des révolutionnaires professionnels pourra bien être alerté pour tout ce qui se passe dans les secteurs géographiques que dans les secteurs sociaux. Il sera ainsi en mesure de rentabiliser toutes les potentialités en faveur de la paix, de la démocratisation, de la reconstruction et de l'unité nationale.

 

Le facteur déterminant pour la résolution de la crise générale au Congo reste la construction de l'Organisation des patriotes et des démocrates congolais, la seule qui pourra être en mesure de conduire un projet de société susceptible d'intégrer les efforts de plusieurs regroupements sociaux et plusieurs générations pour une stabilité durable.

 

La tâche est encore dure et hardie dans cette période où l'impérialisme use de tous les subterfuges pour retarder le plus longtemps l'effondrement de sa base. Les forces impérialistes et réactionnaires mettent en avant leurs agents pour discréditer toute action politique. Ce sont ces agents qui sont les ténors de l’opposition non armée et se sont les mêmes qui sont les leaders de l’opposition armée. Le peuple est ainsi désorienté et développe un sentiment de rejet de tout discours politique même si celui-ci va dans le sens de la défense de ses intérêts. Une campagne anti-communiste, savamment orchestrée, est menée par tous ces représentants de l’impérialisme. Ils expliquent ainsi l’échec de Kabila et son assassinat par le fait qu’il a voulu introduire au Congo des idées surannées qui auraient échoué ailleurs. Aujourd’hui, nous dira-t-on, c’est avec la société civile (Organisation Non Gouvernementale - ONG)  qu’il faudra compter. Pour maintenir sa présence technique au Congo, la Banque Mondiale, dans la perspective d'une reprise de l'aide publique multilatérale, s'appuie sur cette société civile, le “Comité politique, économique et social”.

 

Malgré cette campagne anti-communiste menée par l'impérialisme et ses agents locaux, l'environnement est propice pour la propagation des idées révolutionnaires. Mais le développement en profondeur du travail d'organisation pose pas mal de problèmes. Le plus important reste le fait de ne pas avoir sur place au Congo suffisamment des cadres recyclés sur base de la nouvelle ligne. Pour assurer l'assimilation des orientations de la nouvelle ligne, les contacts physiques avec les camarades les plus avacés s'avèrent indispensables.

 

C'est pourquoi l’Organisation Révolutionnaire du Congo (ORC) avait pris la décision dès la fin de 1996, de se rapprocher du terrain (le Congo) et qu'en 1997, à l'occasion de la prise de pouvoir de l'AFDL, une bonne partie de cadres de l'extérieur devait retourner afin de prendre une part active dans la construction du mouvement démocratique. Nous estimons que s'il n'y a pas de contact physique avec les camarades les plus avancés, il sera difficile d'inverser les tendances négatives des années 60 et 70 qui ont consisté à maintenir un déséquilibre entre la formation des camarades de l'intérieur et ceux de l'extérieur. Les premiers ayant une expérience du terrain, mais non enrichie par les apports internationalistes, le risque de s'orienter plus vers le spontanéisme reste trop grand. Tandis que les seconds qui sont en contact avec les expériences internationalistes, se retrouvent sans les données précises du terrain. Sans un contact permanent, il sera difficile de surmonter la crise du mouvement révolutionnaire au Congo.

 

Permettez nous camarades de profiter de ce moment mémorable pour faire appel à votre solidarité dans la lutte de notre peuple pour la libération nationale et sociale. La solidarité peut, dans cette phase de la reconstruction et de consolidation du parti et du mouvement révolutionnaire au Congo, constituer un des éléments des points d'appui.

 

Le principe de "savoir compter sur ses propres forces", mérite d’être d'interprété à sa juste valeur. Nous estimons que le point fondamental de ce principe est d'acquérir la capacité de construire sa ligne politique et organisationnelle d'une manière indépendante sans jouer au servilisme. Quant aux soutiens matériels et financiers, il y a lieu de les relativiser sinon l'internationalisme prolétarien n'aura aucun sens.

 

Nous ne saurons pas terminer cette présentation sans dénoncer la campagne étourdissante de l’impérialisme pour dénigrer le communisme et le marxisme-léninisme auprès de la jeunesse africaine. Son thème : « le communisme, le marxisme-léninisme c’est du passé ne vise qu'un seul but: écarter les masses opprimées de la voie marxiste-léniniste, pour les rejeter sur les idéologies anti-marxistes qui, en fin de compte, aident à consolider le néocolonialisme. Plus que jamais, nous ne cesserons de réaffirmer cette thèse fondamentale: dans tous les pays du monde, la voie de la libération nationale et sociale consiste à intégrer la vérité révolutionnaire générale, condensée dans les œuvres de Marx, Engels, Lénine, Staline et Mao-tsétoung à la réalité spécifique de la lutte des classes du pays et de l'époque présente.

 

Longue vie au Mouvement Marxiste Léniniste!

Vive l'internationalisme prolétarien!

 

Octobre 2001